• LA BELLE AUX CHEVEUX D OR

     

     

    Il y avait une fois la fille d'un roi qui était si belle, qu'il n'y avait rien de si beau au monde. On la nommait la Belle aux Cheveux d'Or car ses cheveux étaient plus fins que de l'or, et blonds par merveille, tout frisés, qui lui tombaient jusque sur les pieds. Elle allait toujours couverte de ses cheveux bouclés, avec une couronne de fleurs sur la tête et des habits brochés de diamants et de perles, si bien qu'on ne pouvait la voir sans l'aimer.
    Il y avait un jeune roi de ses voisins qui n'était point marié, et qui était bien fait et bien riche. Quand il eut appris tout ce qu'on disait de la Belle aux Cheveux d'Or, bien qu'il ne l'eût point encore vue, il se prit à l'aimer si fort, qu'il en perdait le boire et le manger, et il se résolut de lui envoyer un ambassadeur pour la demander en mariage. Il fit faire un carrosse magnifique à son ambassadeur ; il lui donna plus de cent chevaux et cent laquais, et lui recommanda bien de lui amener la princesse.
    Quand il eut pris congé du roi et qu'il fut parti, toute la cour ne parlait d'autre chose ; et le roi, qui ne doutait pas que la Belle aux Cheveux d'Or ne consentît à ce qu'il souhaitait, lui faisait déjà faire de belles robes et des meubles admirables. Pendant que les ouvriers étaient occupés à travailler, l'ambassadeur, arrivé chez la Belle aux Cheveux d'Or, lui fit son petit message. Mais, soit qu'elle ne fût pas ce jour-là de bonne humeur, ou que le compliment ne lui semblât pas à son gré, elle répondit à l'ambassadeur qu'elle remerciait le roi, mais qu'elle n'avait point envie de se marier.
    L'ambassadeur partit de la cour de cette princesse, bien triste de ne la pas amener avec lui ; il rapporta tous les présents qu'il lui avait portés de la part du roi : car elle était fort sage, et savait bien qu'il ne faut pas que les filles reçoivent rien des garçons. Aussi elle ne voulut jamais accepter les beaux diamants et le reste ; et, pour ne pas mécontenter le roi, elle prit seulement un quarteron d'épingles d'Angleterre.
    Quand l'ambassadeur arriva à la grande ville du roi, où il était attendu si impatiemment, chacun s'affligea de ce qu'il n'amenait point la Belle aux Cheveux d'Or. Le roi se mit à pleurer comme un enfant : on le consolait sans en pouvoir venir à bout.
    Il y avait un jeune garçon à la cour qui était beau comme le soleil, et le mieux fait de tout le royaume : à cause de sa bonne grâce et de son esprit, on le nommait Avenant. Tout le monde l'aimait, hors les envieux, qui étaient fâchés que le roi lui fît du bien et qu'il lui confiât tous les jours ses affaires.
    Avenant se trouva avec des personnes qui parlaient du retour de l'ambassadeur, et qui disaient qu'il n'avait rien fait qui vaille. Il leur dit, sans y prendre garde : " Si le roi m'avait envoyé vers la Belle aux Cheveux d'Or, je suis certain qu'elle serait venue avec moi. "
    Tout aussitôt ces méchantes gens vont dire au roi : " Sire, vous ne savez pas ce que dit Avenant ? Que, si vous l'aviez envoyé chez la Belle aux Cheveux d'Or, il l'aurait ramenée. Considérez bien sa malice, il prétend être plus beau que vous, et qu'elle l'aurait tant aimé, qu'elle l'aurait suivi partout. "
    Voilà le roi qui se met en colère, en colère tant et tant, qu'il était hors de lui. " Ha ! ha ! dit-il, ce joli mignon se moque de mon malheur, et il se prise plus que moi. Allons, qu'on le mette dans ma grosse tour, et qu'il y meure de faim ! "
    Les gardes du roi furent chez Avenant, qui ne pensait plus à ce qu'il avait dit. Ils le traînèrent en prison et lui firent mille maux. Ce pauvre garçon n'avait qu'un peu de paille pour se coucher et il serait mort sans une petite fontaine qui coulait dans le pied de la tour, dont il buvait un peu pour se rafraîchir : car la faim lui avait bien séché la bouche.
    Un jour qu'il n'en pouvait plus, il disait en soupirant : " De quoi se plaint le roi ? Il n'a point de sujet qui lui soit plus fidèle que moi, je ne l'ai jamais offensé. " Le roi, par hasard, passait près de la tour : quand il entendit la voix de celui qu'il avait tant aimé, il s'arrêta pour l'écouter, malgré ceux qui étaient avec lui, qui haïssaient Avenant et qui disaient au roi : " A quoi vous amusez-vous, sire ! ne savez-vous pas que c'est un fripon ? " Le roi répondit : " Laissez-moi là, je veux l'écouter. " Ayant ouï ses plaintes, les larmes lui vinrent aux yeux. Il ouvrit la porte de la tour et l'appela.
    Avenant vint tout triste se mettre a genoux devant lui, et baisa ses pieds : " Que vous ai-je fait, sire, lui dit-il, pour me traiter si durement ?
    - Tu t'es moqué de moi et de mon ambassadeur, dit le roi. Tu as dit que, si je t'avais envoyé chez la Belle aux Cheveux d'Or, tu l'aurais bien amenée.
    - Il est vrai, sire, répondit Avenant, que je lui aurais si bien fait connaître vos grandes qualités, que je suis persuadé qu'elle n'aurait pu s'en défendre ; et en cela je n'ai rien dit qui ne vous dût être agréable. "
    Le roi trouva qu'effectivement il n'avait point de tort ; il regarda de travers ceux qui lui avaient dit du mal de son favori, et il l'emmena avec lui, se repentant bien de la peine qu'il lui avait faite.
    Après l'avoir fait souper à merveille, il l'appela dans son cabinet, et lui dit : " Avenant, j'aime toujours la Belle aux Cheveux d'Or, ses refus ne m'ont point rebuté ; mais je ne sais comment m'y prendre pour quelles veuille m'épouser : j'ai envie de t'y envoyer pour voir si tu pourras réussir. "
    Avenant répliqua qu'il était disposé à lui obéir en toutes choses, et qu'il partirait dès le lendemain.
    " Oh ! dit le roi, je veux te donner un grand équipage.
    - Cela n'est point nécessaire, répondit-il ; il ne me faut qu'un bon cheval, avec des lettres de votre part. "
    Le roi l'embrassa, car il était ravi de le voir sitôt prêt.
    Ce fut le lundi matin qu'il prit congé du roi et de ses amis, pour aller à son ambassade tout seul, sans pompe et sans bruit. Il ne faisait que rêver aux moyens d'engager la Belle aux Cheveux d'Or à épouser le roi. Il avait une écritoire dans sa poche, et, quand il lui venait quelque belle pensée à mettre dans sa harangue, il descendait de cheval et s'asseyait sous des arbres pour écrire, afin de ne rien oublier. Un matin qu'il était parti à la petite pointe du jour, en passant dans une grande prairie, il lui vint une pensée fort jolie ; il mit pied à terre, et se plaça contre des saules et des peupliers qui étaient plantés le long d'une petite rivière qui coulait au bord du pré. Après qu'il eut écrit, il regarda de tous côtés, charmé de se trouver en un si bel endroit. Il aperçut sur l'herbe une grosse carpe dorée qui bâillait et qui n'en pouvait plus, car, ayant voulu attraper de petits moucherons, elle avait sauté si hors de l'eau, qu'elle s'était élancée sur l'herbe, où elle était près de mourir. Avenant en eut pitié ; et, quoiqu'il fût jour maigre et qu'il eût pu l'emporter pour son dîner, il fut la prendre et la remit doucement dans la rivière. Dès que ma commère la carpe sent la fraîcheur de l'eau, elle commence à se réjouir, et se laisse couler jusqu'au fond ; puis revenant toute gaillarde au bord de la rivière : " Avenant, dit-elle, je vous remercie du plaisir que vous venez de me faire ; sans vous je serais morte, et vous m'avez sauvée ; je vous le revaudrai. " Après ce petit compliment, elle s'enfonça dans l'eau ; et Avenant demeura bien surpris de l'esprit et de la grande civilité de la carpe.
    Un autre jour qu'il continuait son voyage, il vit un corbeau bien embarrassé : ce pauvre oiseau était poursuivi par un gros aigle (grand mangeur de corbeaux) : il était près de l'attraper, et il l'aurait avalé comme une lentille, si Avenant n'eût éprouvé de la compassion pour cet oiseau. " Voilà, dit-il, comme les plus forts oppriment les plus faibles : quelle raison a l'aigle de manger le corbeau ? " Il prend son arc qu'il portait toujours, et une flèche, puis, visant bien l'aigle, croc ! il lui décoche la flèche dans le corps et le perce de part en part. L'aigle tombe mort, et le corbeau, ravi, vient se percher sur un arbre. " Avenant, lui dit-il, vous êtes bien généreux de m'avoir secouru, moi qui ne suis qu'un misérable corbeau ; mais je ne demeurerai point ingrat, je vous le revaudrai. "
    Avenant admira le bon esprit du corbeau et continua son chemin. En entrant dans un grand bois, si matin qu'il ne voyait qu'à peine son chemin, il entendit un hibou qui criait en hibou désespéré. " Ouais ! dit-il, voilà un hibou bien affligé ; il pourrait s'être laissé prendre dans quelque filet. " Il chercha de tous côtés, et enfin il trouva de grands filets que des oiseleurs avaient tendus la nuit pour attraper des oisillons. " Quelle pitié dit-il ; les hommes ne sont faits que pour s'entre-tourmenter, ou pour persécuter de pauvres animaux qui ne leur font ni tort ni dommage. "
    Il tira son couteau et coupa les cordelettes. Le hibou prit l'essor ; mais, revenant à tire-d'aile : " Avenant, dit-il, il n'est pas nécessaire que je vous fasse une longue harangue pour vous faire comprendre l'obligation que je vous ai ; elle parle assez d'elle-même : les chasseurs allaient venir, j'étais pris, j'étais mort sans votre secours. J'ai le cœur reconnaissant, je vous le revaudrai. "
    Voilà les trois plus considérables aventures qui arrivèrent à Avenant dans son voyage. Il était si pressé d'arriver, qu'il ne tarda pas à se rendre au palais de la Belle aux Cheveux d'Or. Tout y était admirable ; l'on y voyait les diamants entassés comme des pierres ; les beaux habits, le bonbon, l'argent ; c'étaient des choses merveilleuses: et il pensait en lui-même que, si elle quittait tout cela pour venir chez le roi son maître, il faudrait qu'il ait bien de la chance. Il prit un habit de brocart, des plumes incarnates et blanches ; il se peigna, se poudra, se lava le visage, mit une riche écharpe toute brodée à son cou, avec un petit panier, et dedans un beau petit chien, qu'il avait acheté en passant à Bologne. Avenant était si bien fait, si aimable, il faisait toute chose avec tant de grâce, que, lorsqu'il se présenta à la porte du palais, tous les gardes lui firent une grande révérence ; et l'on courut dire à la Belle aux Cheveux d'Or qu'Avenant, ambassadeur du roi son plus proche voisin, demandait à la voir. Sur ce nom d'Avenant, la princesse dit : " Je gagerais qu'il est joli et qu'il plaît à tout le monde.
    - Vraiment oui, madame, lui dirent toutes ses filles d'honneur : nous l'avons vu du grenier où nous accommodions votre filasse, et tant qu'il est demeuré sous les fenêtres nous n'avons pu rien faire.
    - Voilà qui est beau, répliqua la Belle aux Cheveux d'Or, de vous amuser à regarder les garçons ! Çà, que l'on me donne ma grande robe de satin bleu brodée, et que l'on éparpille bien mes blonds cheveux ; que l'on me fasse des guirlandes de fleurs nouvelles ; que l'on me donne mes souliers hauts et mon éventail ; que l'on balaie ma chambre et mon trône : car je veux qu'il dise partout que je suis vraiment la Belle aux Cheveux d'Or. "
    Voilà toutes ses femmes qui s'empressaient de la parer comme une reine. Elles montraient tant de hâte qu'elles s'entrecognaient et n'avançaient guère. Enfin la princesse passa dans sa galerie aux grands miroirs, pour voir si rien ne lui manquait. Puis elle monta sur son trône d'Or, d'ivoire, et d'ébène, qui sentait comme un baume, et elle commanda à ses filles de prendre des instruments et de chanter tout doucement pour n'étourdir personne.
    On conduisit Avenant dans la salle d'audience. Il demeura si transporté d'admiration, qu'il a dit depuis bien des fois qu'il ne pouvait presque parler. Néanmoins il reprit courage et fit sa harangue à merveille : il pria la princesse qu'il n'eût pas le déplaisir de s'en retourner sans elle.
    " Gentil Avenant, lui dit-elle, toutes les raisons que vous venez de me conter sont fort bonnes, et je vous assure que je serais bien aise de vous favoriser plus qu'un autre. Mais il faut que vous sachiez qu'il y a un mois je fus me promener sur la rivière avec toutes mes dames ; et comme l'on me servit ma collation, en ôtant mon gant je tirai de mon doigt une bague qui tomba par malheur dans la rivière. Je la chérissais plus que mon royaume. Je vous laisse à juger de quelle affliction cette perte fut suivie. J'ai fait serment de n'écouter jamais aucune proposition de mariage, que l'ambassadeur qui me proposera un époux ne me rapporte ma bague. Voyez à présent ce que vous avez à faire là-dessus car quand vous me parleriez quinze jours et quinze nuits, vous ne me persuaderiez pas de changer de sentiment. "
    Avenant demeura bien étonné de cette réponse. Il lui fit une profonde révérence et la pria de recevoir le petit chien, le panier et l'écharpe ; mais elle lui répliqua qu'elle ne voulait point de présents, et qu'il songeât à ce qu'elle venait de lui dire.
    Quand il fut retourné chez lui, il se coucha sans souper. Son petit chien, qui s'appelait Cabriole, ne voulut pas souper non plus : il vint se mettre auprès de lui. De toute la nuit, Avenant ne cessa point de soupirer. " Où puis-je prendre une bague tombée depuis un mois dans une grande rivière ? disait-il : c'est folie d'essayer. La princesse ne m'a dit cela que pour me mettre dans l'impossibilité de lui obéir. "
    Il soupirait et s'affligeait très fort. Cabriole, qui l'écoutait, lui dit : " Mon cher maître, je vous prie, ne désespérez point de votre bonne fortune : vous êtes trop aimable pour n'être pas heureux. Allons, dès qu'il fera jour, au bord de la rivière. "
    Avenant lui donna deux petits coups de la main et ne répondit rien ; mais, tout accablé de tristesse, il s'endormit.
    Cabriole, voyant le jour, cabriola tant qu'il l'éveilla, et lui dit : " Mon maître, habillez- vous, et sortons. " Avenant le voulut bien. Il se lève, s'habille et descend dans le jardin, et du jardin il va insensiblement au bord de la rivière, où il se promenait son chapeau sur ses yeux et ses bras croisés l'un sur l'autre, ne pensant qu'à son départ, quand tout d'un coup il entendit qu'on l'appelait :
    " Avenant ! Avenant ! " Il regarde de tous côtés et ne voit personne ; il crut rêver. Il continue sa promenade ; on le rappelle : " Avenant ! Avenant !
    - Qui m'appelle ? " dit-il.
    Cabriole, qui était fort petit, et qui regardait de près l'eau, lui répliqua : " Ne me croyez jamais, si ce n'est une carpe dorée que j'aperçois. "
    Aussitôt la grosse carpe paraît, et lui dit : "Vous m'avez sauvé la vie dans le pré des Aliziers, où je serais restée sans vous ; je vous promis de vous le revaloir. Tenez, cher Avenant, voici la bague de la Belle aux Cheveux d'Or."
    Il se baissa et la prit dans la gueule de ma commère la carpe, qu'il remercia mille fois.
    Au lieu de retourner chez lui, il fut droit au palais avec le petit Cabriole, qui était bien aise d'avoir fait venir son maître au bord de l'eau. On alla dire à la princesse qu'il demandait à la voir. " Hélas ! dit-elle, le pauvre garçon, il vient prendre congé de moi. Il a considéré que ce que je veux est impossible, et il va le dire à son maître. "
    On fit entrer Avenant, qui lui présenta sa bague et lui dit : " Madame la princesse, voilà votre commandement fait ; vous plaît-il recevoir le roi mon maître Pour époux ? "
    Quand elle vit sa bague où il ne manquait rien, elle resta si étonnée, qu'elle croyait rêver. " Vraiment, dit-elle, gracieux Avenant, il faut que vous soyez favorisé de quelque fée ; car naturellement cela n'est pas possible.
    - Madame, dit-il, je n'en connais aucune, mais j'avais bien envie de vous obéir.
    - Puisque vous avez si bonne volonté, continua-t-elle, il faut que vous me rendiez un autre service, sans lequel je ne me marierai jamais. Il y a un prince, qui n'est pas éloigné d'ici, appelé Galifron, lequel s'était mis dans l'esprit de m'épouser. Il me fit déclarer son dessein avec des menaces épouvantables, que si je le refusais il désolerait mon royaume. Mais jugez si je pouvais l'accepter : c'est un géant qui est plus haut qu'une haute tour ; il mange un homme comme un singe mange un marron. Quand il va à la campagne, il porte dans ses poches de petits canons, dont il se sert de pistolets ; et, lorsqu'il parle bien haut, ceux qui sont près de lui deviennent sourds. Je lui fis répondre que je ne voulais point me marier, et qu'il m'excusât. Depuis, il n'a cessé de me persécuter; il tue tous mes sujets et, avant toutes choses, il faut vous battre contre lui et m'apporter sa tête. "
    Avenant demeura un peu étourdi de cette proposition. Il rêva quelque temps, puis il dit : " Eh bien, madame, je combattrai Galifron. Je crois que je serai vaincu ; mais je mourrai en homme brave. "
    La princesse resta bien étonnée : elle lui dit mille choses pour l'empêcher de faire cette entreprise. Cela ne servit à rien : il se retira pour aller chercher des armes et tout ce qu'il lui fallait. Quand il eut ce qu'il voulait, il remit le petit Cabriole dans son panier, monta sur son beau cheval, et fut dans le pays de Galifron. Il demandait de ses nouvelles à ceux qu'il rencontrait, et chacun lui disait que c'était un vrai démon dont on n'osait approcher : Plus il entendait dire cela, plus il avait Peur. Cabriole le rassurait, en lui disant : " Mon cher maître, pendant que vous vous battrez, j'irai lui mordre les jambes ; il baissera la tête pour me chasser, et vous le tuerez. " Avenant admirait l'esprit du petit chien, mais il savait assez que son secours ne suffirait pas.
    Enfin, il arriva près du château de Galifron. Tous les chemins étaient couverts d'os et de carcasses d'hommes qu'il avait mangés ou mis en pièces. Il ne l'attendit pas longtemps, qu'il le vit venir à travers un bois. Sa tête dépassait les plus grands arbres, et il chantait d'une voix épouvantable : 
    Où sont les petits enfants
    Que je les croque à belles dents ?
    Il m'en faut tant, tant et tant,
    Que le monde n'est suffisant.

    Aussitôt Avenant se mit à chanter sur le même air :

    Approche : voici Avenant,
    Qui t'arrachera les dents.
    Bien qu'il ne soit pas des plus grands,
    Pour te battre il est suffisant.

    Les rimes n'étaient pas bien régulières mais il fit la chanson fort vite, et c'est même un miracle qu'il ne la fît pas plus mal, car il avait horriblement peur. Quand Galifron entendit ces paroles, il regarda de tous côtés, et aperçut Avenant l'épée à la main, qui lui dit deux ou trois injures pour l'irriter. Il n'en fallut pas tant : il se mit dans une colère effroyable, et prenant une massue toute de fer, il aurait assommé du premier coup le gentil Avenant, sans un corbeau qui vint se mettre sur le haut de sa tête, et avec son bec lui donna si juste dans les yeux, qu'il les creva. Son sang coulait sur son visage. Il était comme un désespéré, frappant de tous côtés. Avenant l'évitait et lui portait de grands coups d'épée qu'il enfonçait jusqu'à la garde, et qui lui faisaient mille blessures, par où il perdit tant de sang qu'il tomba. Aussitôt Avenant lui coupa la tête, bien ravi d'avoir été si heureux ; et le corbeau, qui s'était perché sur un arbre, lui dit : " Je n'ai pas oublié le service que vous me rendîtes en tuant l'aigle qui me poursuivait. Je vous promis de m'en acquitter : je crois l'avoir fait aujourd'hui.
    - C'est moi qui vous dois tout, monsieur du Corbeau, répliqua Avenant ; je demeure votre serviteur. "
    Il monta aussitôt à cheval, chargé de l'épouvantable tête de Galifron.
    Quand il arriva dans la ville, tout le monde le suivait et criait : " Voici le brave Avenant qui vient de tuer le monstre " ; de sorte que la princesse, qui entendit bien du bruit et qui tremblait qu'on ne lui vînt apprendre la mort d'Avenant, n'osait demander ce qui lui était arrivé ; mais elle vit entrer Avenant avec la tête du géant, qui ne laissa pas de lui faire encore peur, bien qu'il n'y eût plus rien à craindre.
    " Madame, lui dit-il, votre ennemi est mort ; j'espère que vous ne refuserez plus le roi mon maître ?
    - Ah ! si fait, dit la Belle aux Cheveux d'Or, je le refuserai si vous ne trouvez moyen, avant mon départ, de m'apporter de l'eau de la grotte ténébreuse. Il y a proche d'ici une grotte profonde qui a bien six lieues de tour. On trouve à l'entrée deux dragons qui empêchent qu'on y entre. Ils ont du feu dans la gueule et dans les yeux. Puis, lorsqu'on est dans la grotte, on trouve un grand trou dans lequel il faut descendre : il est plein de crapauds, de couleuvres et de serpents. Au fond de ce trou, il y a une petite cave où coule la fontaine de beauté et de santé: c'est de cette eau que je veux absolument. Tout ce qu'on en lave devient merveilleux : si l'on est belle, on demeure toujours belle ; si l'on est laide, on devient belle ; si l'on est jeune, on reste jeune ; si l'on est vieille, on devient jeune. Vous jugez bien, Avenant, que je ne quitterai pas mon royaume sans en emporter.
    - Madame, lui dit-il, vous êtes si belle que cette eau vous est bien inutile ; mais je suis un malheureux ambassadeur dont vous voulez la mort : je vais aller chercher ce que vous désirez, avec la certitude de n'en pouvoir revenir. "
    La Belle aux Cheveux d'Or ne changea point de dessein, et Avenant partit avec le petit chien Cabriole, pour aller à la grotte ténébreuse chercher de l'eau de beauté. Tous ceux qu'il rencontrait sur le chemin disaient : " C'est une pitié de voir un garçon si aimable aller se perdre de gaieté de cœur ; il va seul à la grotte, et quand irait-il accompagné de cent braves, il n'en pourrait venir à bout. Pourquoi la princesse ne veut-elle que des choses impossibles ? " Il continuait de marcher, et ne disait pas un mot ; mais il était bien triste.
    Il arriva vers le haut d'une montagne où il s'assit pour se reposer un peu, et il laissa paître son cheval et courir Cabriole après des mouches. Il savait que la grotte ténébreuse n'était pas loin de là, il regardait s'il ne la verrait point. Enfin il aperçut un vilain rocher noir comme de l'encre, d'où sortait une grosse fumée, et au bout d'un moment un des dragons, qui jetait du feu par les yeux et par la gueule : il avait le corps jaune et vert, des griffes et une longue queue qui faisait plus de cent tours. Cabriole vit tout cela ; il ne savait où se cacher, tant il avait peur.
    Avenant, tout résolu de mourir, tira son épée, descendit avec une fiole que la Belle aux Cheveux d'Or lui avait donnée pour la remplir de l'eau de beauté. Il dit à son chien Cabriole : " C'en est fait de moi ! je ne pourrai jamais avoir de cette eau qui est gardée par des dragons. Quand je serai mort, remplis la fiole de mon sang et porte-la à la princesse, pour qu'elle voie ce qu'elle me coûte ; et puis va trouver le roi mon maître et conte-lui mon malheur."
    Comme il parlait ainsi, il entendit qu'on appelait : " Avenant ! Avenant ! "
    Il dit : " Qui m'appelle ? " et il vit un hibou dans le trou d'un vieil arbre, qui lui dit : " Vous m'avez retiré du filet des chasseurs où j'étais pris, et vous me sauvâtes la vie, je vous promis que je vous le revaudrais : en voici le temps. Donnez-moi votre fiole : je sais tous les chemins de la grotte ténébreuse ; je vais vous chercher de l'eau de beauté. "
    Dame ! qui fut bien aise ? je vous le laisse à penser. Avenant lui donna vite la fiole, et le hibou entra sans nul empêchement dans la grotte. En moins d'un quart d'heure, il revint rapporter la bouteille bien bouchée. Avenant fut ravi. Il le remercia de tout son cœur, et, remontant la montagne, il prit le chemin de la ville bien joyeux.
    Il alla droit au palais ; il présenta la fiole à la Belle aux Cheveux d'Or, qui n'eut plus rien à dire : elle remercia Avenant, et donna ordre à tout ce qu'il fallait pour partir ; puis elle se mit en voyage avec lui. Elle le trouvait bien aimable et lui disait quelquefois : " Si vous aviez voulu, je vous aurais fait roi, nous ne serions point partis de mon royaume. "
    Mais il répondit : " Je ne voudrais pas faire un si grand déplaisir à mon maître pour tous les royaumes de la terre, quoique je vous trouve plus belle que le soleil. "
    Enfin ils arrivèrent à la grande ville du roi, qui, sachant que la Belle aux Cheveux d'Or venait, alla au-devant d'elle et lui fit les plus beaux présents du monde. Il l'épousa avec tant de réjouissances que l'on ne parlait d'autre chose. Mais la Belle aux Cheveux d'Or, qu'aimait Avenant dans le fond de son cœur, n'était heureuse que quand elle le voyait, et le louait toujours. " Je ne serais point venue sans Avenant, dit-elle au roi. Il a fallu qu'il ait fait des choses impossibles pour mon service : vous lui devez être obligé. Il m'a donné de l'eau de beauté : je ne vieillirai jamais, je serai toujours belle. "
    Les envieux qui écoutaient la reine dirent au roi : " Vous n'êtes point jaloux, et vous avez sujet de l'être. La reine aime si fort Avenant qu'elle en perd le boire et le manger. Elle ne fait que parler de lui et des obligations que vous lui avez, comme si tel autre que vous auriez envoyé n'en eût pas fait autant. "
    Le roi dit : " Vraiment, je m'en aperçois ; qu'on aille le mettre dans la tour avec les fers aux pieds et aux mains."
    On prit Avenant, et, pour sa récompense d'avoir si bien servi le roi, on l'enferma dans la tour avec les fers aux pieds et aux mains. Il ne voyait personne que le geôlier, qui lui jetait un morceau de pain noir par un trou, et de l'eau dans une écuelle de terre. Pourtant son petit chien Cabriole ne le quittait point ; il le consolait et venait lui dire toutes les nouvelles.
    Quand la Belle aux Cheveux d'Or sut sa disgrâce, elle se jeta aux pieds du roi, et, tout en pleurs, elle le pria de faire sortir Avenant de prison. Mais plus elle le priait, plus il se fâchait, songeant : " C'est qu'elle l'aime "; et il n'en voulut rien faire. Elle n'en parla plus ; elle était bien triste.
    Le roi s'avisa qu'elle ne le trouvait peut-être pas assez beau ; il eut envie de se frotter le visage avec de l'eau de beauté, afin que la reine l'aimât plus qu'elle ne faisait. Cette eau était dans une fiole sur le bord de la cheminée de la chambre de la reine, elle l'avait mise là pour la regarder plus souvent ; mais une de ses femmes de chambre, voulant tuer une araignée avec un balai, jeta par malheur la fiole par terre, qui se cassa, et toute l'eau fut perdue. Elle balaya vitement, et, ne sachant que faire, elle se souvint qu'elle avait vu dans le cabinet du roi une fiole toute semblable pleine d'eau claire comme était l'eau de beauté ; elle la prit adroitement sans rien dire, et la porta sur la cheminée de la reine.
    L'eau qui était dans le cabinet du roi servait à faire mourir les princes et les grands seigneurs quand ils étaient criminels ; au lieu de leur couper la tête ou de les pendre, on leur frottait le visage de cette eau : ils s'endormaient, et ne se réveillaient plus. Un soir donc, le roi prit la fiole et se frotta bien le visage, puis il s'endormit et mourut. Le petit chien Cabriole l'apprit parmi les premiers et ne manqua pas de l'aller dire à Avenant, qui lui dit d'aller trouver la Belle aux Cheveux d'Or et de la faire souvenir du pauvre prisonnier.
    Cabriole se glissa doucement dans la presse ; car il y avait grand bruit à la cour pour la mort du roi. Il dit à la reine : " Madame, n'oubliez pas le pauvre Avenant. " Elle se souvint aussitôt des peines qu'il avait souffertes à cause d'elle et de sa grande fidélité. Elle sortit sans parler à personne, et fut droit à la tour, où elle ôta elle-même les fers des pieds et des mains d'Avenant. Et, lui mettant une couronne d'or sur la tête et le manteau royal sur les épaules, elle lui dit : "Venez, aimable Avenant, je vous fais roi et vous prends pour mon époux. "
    Il se jeta à ses pieds et la remercia. Chacun fut ravi de l'avoir pour maître. Il se fit la plus belle noce du monde, et la Belle aux Cheveux d'Or vécut longtemps avec le bel Avenant, tous deux heureux et satisfaits.

    Si par hasard un malheureux
    Te demande ton assistance,
    Ne lui refuse point un secours généreux.
    Un bienfait tôt ou tard reçoit sa récompense.
    Quand Avenant, avec tant de bonté,
    Servati carpe et corbeau ; quand jusqu'au hibou même,
    Sans être rebuté de sa laideur extrême,
    Il conservait la liberté !
    Aurait-on jamais pu le croire,
    Que ces animaux quelque jour
    Le conduiraient au comble de la gloire,
    Lorsqu'il voudrait du roi servir le tendre amour ?
    Malgré tous les attraits d'une beauté charmante,
    Qui commençait pour lui de sentir des désirs,
    Il conserve à son maître, étouffant ses soupirs,
    Une fidélité constante.
    Toutefois, sans raison, il se voit accusé :
    Mais, quand à son bonheur il paraît plus d'obstacle,
    Le Ciel lui devait un miracle,
    Qu'à la vertu jamais le Ciel n'a refusé.

     

     


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  • MOLLY ET LE PETIT POISSON D OR

     

     

    Molly vivait avec ses parents dans une petite maison de bois au bord de la mer sur une île lointaine. Ses parents

    étaient pêcheurs. Ils étaient pauvres et ne vivaient qu’avec le peu d’argent que leur rapportait la vente au marché

    de leur pêche. Les autres pêcheurs n’étaient guère plus riches qu’eux.

    Toute petite déjà, Molly avait le droit d’accompagner ses parents à leurs sorties en mer. La barque était vieille et

    l’eau s’y infiltrait souvent quand les vagues roulaient plus fort. Le filet, que son papa lançait au loin pour tenter

    d’attraper les plus gros poissons, s’était troué sur les rochers. Il ne pouvait même pas payer le remmaillage de

    son filet à la vieille dame, assise au port et qui passait ses jours à s’abîmer la vue sur les trous à réparer.

    En mer, Molly aidait sa mère à trier les poissons par taille et couleur pour préparer un joli étal à leur retour. La

    famille Malloy était connue pour la belle présentation de leurs poissons et leur qualité de fraîcheur.

    Un jour, au milieu de tous ces poissons encore frétillants, quand le filet avait été vidé par son père sur le fond de

    la barque, Molly remarque un petit poisson tout jaune. Celui-ci la regardait avec de grands yeux marrons et

    semblait vouloir lui dire quelque chose.

    Oh, s’écria Molly, celui-là je le garde pour moi et vivant ! Aussitôt elle emplit une vieille boite de conserves d’eau

    de mer et y mit le petit poisson doré. Une fois rentré il aura un bocal en verre. Les parents de Molly souriaient et

    pensaient, que de toutes les façons, ce poisson était trop petit pour être vendu.

    Tous les matins, Molly nourrissait « Flèche d’Or », elle l’avait surnommé ainsi tant il tournait vite dans sa nouvelle

    maison, et le soir elle lui parlait en lui souhaitant une bonne nuit. Un jour avant d’aller coucher, Molly plongea sa

    main dans le bocal pour caresser son poisson doré. Lorsqu’elle ressortit sa main du bocal celle-ci était recouverte

    de paillettes d’or. Elle secoua sa main pour s’en débarrasser et, tout d’un coup, tous ces minuscules débris

    dorés se rassemblèrent dans sa main pour former une belle pièce d’or.

    A compter de ce jour la famille Malloy n’eut plus jamais faim. Le papa de Molly a pu s’acheter une nouvelle

    barque et un filet tout neuf, bien plus solide que le vieux. Ils invitèrent à manger tous leurs amis pêcheurs et leurs

    familles. La vieille cabane fut rénovée et Molly offrit une paire de lunettes toute neuve à la vieille dame qui

    réparait les filets au port.

    Grâce à Molly et son poisson d’or, l’île entière vivait enfin heureuse.

    Connemara et les Iles d'Aran, Irlande

     


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  • LILA OU LA PETITE ETOILE FILANTE

     

     

    Il était une fois Lila, petite étoile filante, rieuse et coquine, joyeuse et lumineuse; son papa, Milano, astre costaud et sa maman, Thésa, poussière d’étoiles, étaient vraiment très fiers de leur petite STAR.

    Aujourd’hui, c’était l’anniversaire de Lila ; elle avait 45000 millions d’années et elle était enfin majeure ! Papa et maman avaient donc décidé de lui offrir un joli cadeau, un cadeau spécial …

    La famille de Lila, depuis la nuit des temps, avait pour mission de faire plaisir aux « gens d’en bas », les terriens, ces curieux humains capables du meilleur comme du pire ! Ces hommes et ces femmes étaient parfois tellement surprenants, amusants souvent, mais surtout très attachants ! Lila et sa famille aimaient beaucoup les regarder vivre et se plaisaient à remplir fidèlement leur mission en leur offrant moult présents ! De jolis rêves, de belles pensées, un cœur léger, des sourires et des rires … tout plein de petits bonheurs quotidiens illuminant les visages des terriens.

    C’était désormais au tour de Lila de perpétuer la tradition en se consacrant aux enfants ! « Ta mission, explique maman, est de récompenser les gentils enfants en leur permettant d’exaucer leur vœu le plus cher » ! 
    « Jolie mission » pensa Lila ! 
    « Tous les jours, tu observeras les enfants du monde entier, et tu choisiras l’enfant le plus gentil de la journée. Attention, il faudra rester juste et impartiale » lui conseilla maman ! 
    « Tu exauceras le vœu du petit garçon ou de la petite fille que tu auras choisi et, à son réveil, le rêve de l’enfant sera réalisé. » ajouta papa.

    Lila était aux anges ! Ses parents lui avaient confié une mission de taille ! Jusqu’à présent, c’était Tatie Maya qui s’occupait de tout cela ! Et aujourd’hui, c’était elle qui reprenait le flambeau ! « Tu commenceras dès demain ! » dit papa ! « Mais rassure-toi, Tatie Maya t’aidera dans les premiers jours et te montrera comment faire ! »

    Lila était bien consciente de la difficulté de sa tâche car des enfants gentils, il devait y en avoir beaucoup, tous les jours, et dans tous les pays ! Elle savait déjà qu’elle devrait être très attentive et observer minutieusement tous les enfants du monde. 
    Le lendemain, Tatie Maya et Lila se mirent donc au travail ! Heure après heure, elles observèrent les enfants, de toutes les couleurs, de toutes les tailles, de toutes les religions, sans distinction aucune. Lila avait toujours pensé qu’un enfant restait toujours un enfant, d’où qu’il venait.

    Le choix de Lila se porta sur Timothée, petit garçon irlandais aux cheveux tout roux ; sa frimousse était parsemée de tâches de son et ses grands yeux verts brillaient de malice. Timothée avait 8 ans et aujourd’hui, il avait soigné sa maman malade ; il lui avait préparé un peu de soupe pour l’aider à reprendre des forces, lui avait joué un petit air de violon pour la consoler car il savait que sa maman adorait la musique, et lui avait remonté ses couvertures pour qu’elle n’ait pas froid. Un vrai petit homme. Lila avait été touchée par ce petit garçon qui avait veillé avec beaucoup de soin sur sa maman. Ce soir, lorsque Timothée s’endormira, Lila déposera au pied de son lit la bicyclette rouge dont rêvait le petit …

    Lila sentit son cœur se serrer ; elle était émue ... Comment de si petits êtres pouvaient être aussi forts, aussi courageux ? Décidément, ces humains étaient fort étonnants ! Elle adorait sa mission, ce rôle si agréable qu’on lui avait confié et elle avait déjà bien hâte d’être à demain pour combler le cœur d’un nouvel enfant.

    Fatiguée de cette première journée pleine d’émotions, Lila se mit au lit ; elle s’allongea sur son petit nuage de coton tout moelleux, se cala contre son doudou, Atmosphère, tapota son oreiller et s’endormit paisiblement, heureuse d’avoir rempli de bonheur le cœur d’un petit.

    « Fais de jolis rêves Lila et à demain » … lui susurra le vent.

    La morale de cette comptine, vous l’aurez compris, c’est que ce monde serait bien triste sans enfant. Leurs sourires n’ont pas de prix … Protégeons-les.

     


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  • JEANNOT ET  L ILE AUX FEES

     

    C’était au temps des bonheurs et des langueurs d’enfance.Au temps des longues colonies de vacances au bord de la mer, à Belle-Île, la bien nommée.
    Les enfants y venaient de Paris et de banlieue, d’immenses cités dortoir cosmopolites.Le sac usé ou la valise trop grande, et au fond, la liste du trousseau .Le maillot de bain neuf acheté pour l’occasion, le doudou râpé à portée de main. Le bandana autour du cou, le porte-clé cliquetant sur la hanche, ou le scoubidou en porte bonheur…du style, pour un air de liberté.
    La brosse à dents intacte, le dentifrice trop piquant, et le shampooing parfois dégoulinant dans la trousse, au risque de tâcher les belles enveloppes prêtes à poster, en attente d’une carte postale ou d’un courrier.
    Ils avaient l’œil humide et curieux, assoiffé de paysages, tour à tour tristes et enjoués, déjà en quête de leur amour d’été.Assoupis dans le roulis du train, puis parachutés dans l’air vif et marin, embarqués sur l’Acadie, fameux bateau, pour des rivages lointains et mystérieux, qui font grandir d’un coup.

    J’étais mono, fraîchement sortie de l’enfance, encore un pied dedans, la besace pleine de trésors et de jeux .J’eu la chance cet été là d’hériter de six petites fées de 5 et 6 ans :
    Une blonde aux boucles dorées et minois d’ange.
    Une brune, vive et parfumée, fluette et l’œil coquin.
    Une rousse au teint d’écureuil, au goût de miel et feuille d’automne.
    Une ronde, naïve et potelée, rieuse et joufflue, comme un abricot.
    Une douce, brin de paille, discrète et ordonnée, qui ne se salissait jamais.
    Et pour finir, une fée en chocolat que l’on avait envie de croquer, si ce n’est sa coiffure d’aztèque sophistiquée !

    La vie était riche et joyeuse, faite de rires et de chansons, de jeux, de découvertes, de sable chaud, de pâtés et d’éclaboussures, d’écume, de coquillages et de vagues douces.

    Un jour, à la lisière du bois et de la citadelle, une fête mi-foire mi-kermesse, nous conduisit , mes six fées et moi-même, à nous mêler à la foule des curieux et des amuseurs.
    Nous observions un gros monsieur moustachu tourner une immense roue moyenâgeuse qui grinçait ; il haranguait les visiteurs pour distribuer de petits cartons moyennant un ou deux sous. Un vieil homme, charmé sans doute par notre jeunesse, ému de nos yeux écarquillés, nous distribua à chacune une chance à saisir au vol : sept cartons porte-bonheur. La roue tourna une fois, deux fois, et encore… plusieurs fois, pour stopper sur un numéro.

    « Numéro 10 ! Clama le saltimbanque de sa voix de ténor.Qui a le numéro 10 ?!

    _ Moi ! Osa timidement ma petite fée aux boucles d’or.

    _Bravo ! reprit l’homme, tu as gagné ma belle ! Regardez, cette petite fille a gagné un lapin vivant !! »

    Il attrapa par les oreilles, une énorme bête bigarrée, la flanqua dans un carton, et nous tendit notre lot avec les félicitations du jury. Mes six fées étaient transportées de joie ! Agglutinées autour du carton, elle rentrèrent à la colo, en se marchant sur les pieds, pendant que six petites mains caressaient Jeannot tapis au fond de son carton, baptisé sur le chemin de ce nom, ma foi commun, mais qui lui allait très bien !

    A notre arrivée, le terrible directeur n’était pas là, ouf ! Pas méchant le bougre, mais impressionnant, lorsqu’il poussait sa voix tonitruante ou grondait les enfants !
    Que dirait-il s’il apprenait l’existence de Jeannot ? Le tuerait-il ? Quelle serait sa vengeance ? Un civet, une gibelotte ? Rien qu’à l’idée que Jeannot puisse être tué et mangé, les six petites fées pâlirent d’effroi et se réunirent avec ferveur pour nommer des souhaits en faveur de notre animal, qui sans le savoir devînt le fétiche de ce mois de vacances et de toute la colo !

    Nous avions un complice, bras droit du directeur, un ami, un adorateur de petites fées. Nous le soignions en douce, au retour de chaque promenade : des fleurs, des mûres des bois, un sucre d’orge ou un nounours en chocolat, un dessin ou une petite course achetée à sa demande au bureau de tabac ou au grand bazar. Ce jour là, la surprise était de taille, et fort inattendue ! Il blêmit, hésita, puis devant la mine expectative des fillettes, il fondit de sourires, cacha Jeannot dans les douches, promis de lui donner à manger, et de le surveiller en attendant de trouver une autre solution.

    Le lendemain, Jeannot faisait sa toilette. Les douches, c’était fait pour ça après tout ! Il avait éparpillé des crottes sur le carrelage de la vaste salle de bain, et se promenait d’un bac à l’autre en se lissant les oreilles, et l’œil aux aguets.

    « Vite ! Faites lui prendre l’air, souffla notre complice, le dirlo ne va jamais sous les grands arbres, mais bon, il va se carapater votre lapin, c’est certain ! «

    Jeannot grignota les tartines que lui avait gardées les fées de leur petit déjeuner, dégusta les pissenlits de Brin de paille, sortit de son carton avec élégance, croqua l’herbe tendre, se laissa cajoler, caresser, et s’éloigna avec prudence.Dès que l’une des fillettes l’appelait, il rejoignait la petite troupe qui l’avait adopté en commun accord, sans qu’il n’y eut jamais la moindre dispute ou jalousie à son sujet.Comment ont-elles pu rendre notre Jeannot si docile, si doux , paisible, tolérant aux multiples caresses et soins qui lui étaient prodigués ? Sans doute avait –il été bien éduqué, mais sous le regard des petites filles, il devenait un merveilleux personnage de contes de fées ! 
    Il s’aventurait sur le terrain de foot, sous l’œil amusé des garçons, puis rentrait sagement à son carton, passait la nuit sous son chêne, patient, en attendant l’heure des jeux.

     

    Jeannot Lapin aimait courir, cabrioler, se mettre sur le côté et se laisser aduler, partir et revenir, gambader dans l’herbe fraîche du soir ou la rosée du matin.les fées l’appelait, il arrivait en trottinant après avoir humé l’éveil de la nature et croqué quelques fleurs.De jour en jour, il s’aventurait un peu plus loin, mais revenait toujours docile.

    Un soir, alors que les petites fées riaient de ses espiègleries, Monsieur Le Directeur montra sa silhouette massive sur le terrain de jeux. Avait-il eu vent de nos cabrioles et de l’existence d’un nouveau colon quelque peu différent ? Sans doute, car tout le monde en parlait.Les cuisinières soupiraient entre elles : « Une bien belle bête ! Un bon civet ou un bon pâté pour la première qui saura l’attraper… Quand les enfants seront partis, bien sûr ! »
    Le maître des lieux fit mine de chercher quelqu’un, aperçut les six petites fées, le visage défait, qui faisaient barrage devant le carton. Malheur ! Jeannot se baladait tranquillement sur le terrain de foot, plus visible qu’un ballon ! Les fées étaient vertes, j’étais rouge, le ciel était bleu, le temps était rose suspendu, et se teintait de gris. L’homme resta neutre en s’étirant la moustache, et s’en fut sans dire un mot, comme s’il n’avait rien vu.

    Il se contenta de m’appeler avant la fin du séjour, j’attendais un verdict, mais il me dit après quelques compliments :
    « Tu vas ramener les enfants à Paris à la fin du mois, tu seras chef de convoi !

    _ Pas de problème, je devrais savoir faire ça ! »

    J’attendais une allusion à notre cher Jeannot, mais rien…pas même un mot !

    « Si ça se trouve, Jeannot sera tué quant on va partir ! Dit tristement ma fée Ecureuil

    _ Peut-être pas, il va rester en liberté, espéra la fée Chocolat

    _ Il aura toute l’île pour lui ! Renchérit la Brune aux yeux coquins

    _ Il trouvera un jardin avec plein de légumes, des fleurs et du thym, reprit la fée Abricot

    _ Il sera heureux ?rêva Brin de paille.

    _Il trouvera une copine et aura des bébés lapins, continua Boucles d’or ».

    Nous chantions « colchique dans les prés » et « Ce n’est qu’un au revoir », jusqu’au dernier soir ? dans le ciel orangé de cet fin d’été. Jeannot écoutait et quelques larmes de fées perlèrent sur son doux pelage.
    « Adieu Jeannot, soit heureux sur l’île, et peut-être à l’année prochaine ! Tu nous présenteras ta famille ! »


    Dans ce petit matin clair et brumeux de ce 31 août, je pris la tête de la petite troupe nostalgique. L’Acadie fit entendre sa sirène sourde aux accents maritimes .Les enfants de banlieue basanés et grandis grimpèrent à son bord, l’œil humide et la curiosité en berne, encore plus tristes et plus heureux qu’à l’aller. Pour nous dire « au -revoir » notre ami complice lança des pétales de fleurs qui s’éparpillèrent au fil de l’eau, et l’hymne aux adieux se fit entendre, ritournelle magique en innéfaçable souvenir.
    L’Acadie quitta le port, pendant que les amours enfantines pleuraient à chaudes larmes, un morceau de papier quadrillé rempli d’adresses postales au creux de la main. Et oui, il n’y avait pas de téléphone portable, ni de boite email à l’époque !

    Pour mes six petites fées une seule pensée trottinait dans leur tête : Jeannot, copain de l’île…Surtout ne pas penser qu’il finira en pâté !
    C’est alors que du grand sac à dos de Boucle d’or, pointèrent deux longues oreilles roses et blanches !

    « Chut ! Taisez-vous ! Il sera sage ! Vous inquiétez pas, mes parents sont gentils et végétariens ! Ils aiment bien les animaux, ils seront contents ! »

     

     


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  • DIDI LA SOURIS

     

     

     

    Le père-Noël : Armand, Pampin vous irez chercher au grenier 
    la malle aux livres pour la veillée de ce soir.
    Pendant ce temps je vais chercher du bois pour allumer 
    un bon feu dans la cheminée.

    Armand : J’ai peur d’aller au grenier tu sais Pampin, on 
    Pourrait rencontrer un monstre.

    Pampin : Ha ha ha s’esclaffe Pampin, mais non gros trouillard 
    il n’y a personne au grenier que tu puisses 
    rencontrer, prenons la lanterne, aller viens regarde 
    dit-il en ouvrant la porte, ou ou y a quelqu’un ici.

    Armand : Bon aller arrêtes de te moquer de moi et cherchons 
    la malle aux livres où est-elle (tout à coup les 
    lutins entendent du bruit.)
    Ho tu as entendu Pampin ce bruit j’ai peur (il tremble)

    Pampin : Oui oui moi aussi j’ai peur (il tremble à son tour.)


    Armand : Pampin tu vois je t’avais dit ho ho on va mourir
    écrasé ou bien mangé par un monstre.

    Pampin : (se ressaisi) Mais non voyons il n’y a personne !
    Allons soit courageux et cherchons plutôt d’où 
    Proviens ce bruit.

    Armand : non non ne me quitte pas !

    Pampin : Mais tu sais on ferai beaucoup plus vite si on allé 
    Chacun de son côté.

    Armand : Non non j’ai peur tiens écoute encore ce bruit viens 
    descendons et nous dirons au père-noël que nous 
    n’avons pas trouvé la malle aux livres.

    Pampin : Et nous priver d’une veillée lecture ? ha non c’est 
    Formidable les livres moi j’aime les histoires et je 
    Veux savoir d’où viens ce bruit, restes là, je vais 
    Chercher tout seul.

    Armand : Je te suis attend moi !

    Pampin s’arrête net 

    Pampin : Ha ha ha regarde…. Regarde ton monstre c’est une 
    petite souris !

    Armand : fais voir … petite petite pas si petite que ça
    Quand même !

    Pampin : Mais que fait-elle ?
    Ho elle mange un livre regarde c’est trop fort elle
    a trouvé la malle aux livres.

    Armand : Et petite souris que fais-tu ?

    DIDI : NON NON NE ME FAITES PAS MAL JE ME SAUVE !

    Pampin : attend ne part pas ! Bonjour je m’appelle Pampin et 
    voici Armand nous sommes les lutins du père-noël nous 
    venons chercher la malle aux livres et toi comment 
    t’appelles-tu.

    DIDI : Bon bonjour je m’appelle Didi je suis une souris !

    Armand : Pourquoi manges-tu les livres ? 
    Tu sais le père-noël va se fâcher si tu manges tous 
    nos livres.

    Didi : C’est l’hiver et je n’ai plus rien a manger alors 
    J’ai trouvé vos livres et comme j’ai fain !

    Pamin : Mais Didi les livres ne se mangent pas tu sais ça
    Sert a raconter des histoires pour rêver.

    Armand : Oui tu peut imaginer devenir un chevalier très 
    Fort !

    Pampin : Ou bien un capitaine de bateau !


    Didi : Mais moi j’ai fain et je mange ce que je trouve !

    Armand : Nous allons trouver une solution pour que tu n’ai 
    Plus fain !

    Pampin : Mais oui Armand tu as raison, pendant les mois 
    d’hiver nous t’apporterons un bon gros morceau
    de fromage ainsi que du lait qu’en penses-tu 
    Didi ?

    Didi : Je suis d’accord avec vous mais on pourrait aussi
    Continuer toute l’année ?

    Armand : On verra avec le père-noël s’il est d’accord.

    Pampin : Aller Armand descendons la malle et
    Toi Didi nous t’invitons à la veillée, le père-noël 
    va nous lire des histoires.

    Et voilà nos trois nouveaux amis qui descendent la malle.

    Les lutins : PERE-NOEL PERE-NOEL !

    P-NOEL : Qu’avez-vous donc à crier les lutins !

    Pampin : Reguarde, nous te présentons DIDI la petite souris,

    Armand : Nous l’avons surprise à grignoter les livres, elle 
    A fain tu sais !

    P-NOEL : A BON et bien allez lui chercher un gros morceau de 
    Fromage qu’elle mangera pendant que je vous ferai la
    Lecture et toi petite souris coquine ne mange plus 
    nos livres.

    DIDI : Merci Père-Noël que tu es gentil.


    Depuis ce jour Didi n’a plus fain, maintenant elle a trois amis et quand le père-noël prend un livre que Didi a rongé, au lieu de la gronder il lui caresse le dessus de la tête.


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